Les villes in[pré]visibles, habiter l’hétérotopie
Collectif
Architecture et Anthropologie
[Point de départ]
En 1968, alors que les manifestations battent leur plein dans la plupart des grandes villes européennes, «l’affaire de Louvain » (Leuven) provoque une crise politique majeure entre néerlandophones et francophones. En conséquence l’Université de Louvain, fondée en 1425, est scindée en deux entités : la KUL et l’UCL. Cette séparation est l’occasion de concevoir la première ville nouvelle belge depuis la fondation de Charleroien 1666.
Louvain-La-Neuve (LLN) naît ainsi sur base du projet des architectes Raymond Lemaire, Jean-Pierre Blondel et Pierre Laconte. Les principes directeurs de ce projet sont claires : mixité sociale (mélange étudiants/professeurs), échelle humaine et ville piétonne. Le schéma urbanistique de LLN prend appui sur une référence géographique : San Gimignano, village en Toscane dont la partie historique s’articule autour de deux rues parallèles. Une certaineuniformité dans les tons de briques et de pierres, le côté sinueux des ruelles, une harmonie dans les hauteursde bâtisse constituent également une source d’inspiration pour ces architectes.
En parallèle à la construction de la ville, un quartier non planifié se crée en refusant la programmation urbaineimposée par l’UCL. Dans la mouvance de mai 68, le quartier de la Baraque voit le jour et développe un habitat alternatif. Le mode de vie de la Baraque se base alors sur plusieurs principes communautaires : auto-construction,réappropriation du sol, gestion collective et auto-production alimentaire.
Le quartier de la Baraque constitue notre point de départ pour ce quadrimestre.
[Question]
Explorer, Rencontrer, Répertorier, Révéler, Raconter... le quartier de la Baraque constitue le point de départ de toutes les démarches prospectives de l’atelier. Ce quartier peut se définir comme une hétérotopie(Foucault, 1967) : une localisation physique de l’utopie.
« Il y a dans toute culture, dans toute civilisation, des lieux réels, des lieux effectifs, des lieux quisont dessinés dans l'institution même de la société, et qui sont des sortes de contre-emplacements, sortes d'utopies effectivement réalisées dans lesquelles les emplacements réels, tous les autres emplacements réels que l'on peut trouver à l'intérieur de la culture sont à la foisreprésentés, contestés et inversés, des sortes de lieux qui sont hors de tous les lieux, bien quepourtant ils soient effectivement localisables »
La Baraque s’est construit sur une vision différente, en réaction à celle imposée par l’UCL. Les premiers habitants ont du réfléchir à comment habiter un espace affranchi des normes, à comment habiter une hétérotopie. Nous posons la même question aujourd’hui en nommant notre programme :
Au-delà du concept hétérotopique, il faudra aussi comprendre, clarifier et définir la notion d’habiter. Dansl’ouvrage « Demeure terrestre» (Paquot, 2005), l’auteur questionne l’usage de ce terme :
« ‘Habiter’ (wohnen) signifie ‘être-présent-au-monde-et-à-autrui’. […] Loger n’est pas ‘habiter’. L’action d’‘habiter’ possède une dimension existentielle. […] ‘Habiter’ c’est […] construire votre personnalité, déployer votre être dans le monde qui vous environne et auquel vous apportez votre marque et qui devient vôtre. […] C’est parce qu’habiter est le propre des humains […] qu’inhabiter ressemble à un manque, une absence, une contrainte, une souffrance, uneimpossibilité à être pleinement soi, dans la disponibilité que requiert l’ouverture »
Ces étapes analytiques devront permettre à chaque étudiant de proposer un site (autre que la Baraque) enBelgique ou ailleurs dont le choix devra être argumenté.
Ce choix, ainsi que le projet résultant de ce choix, seront la base de la posture attendue par un architecteayant replacé l’Homme au centre de ses réflexions.
Les villes in[pré]visibles, habiter l’hétérotopie
Collectif
Architecture et Anthropologie
[Point de départ]
En 1968, alors que les manifestations battent leur plein dans la plupart des grandes villes européennes, «l’affaire de Louvain » (Leuven) provoque une crise politique majeure entre néerlandophones et francophones. En conséquence l’Université de Louvain, fondée en 1425, est scindée en deux entités : la KUL et l’UCL. Cette séparation est l’occasion de concevoir la première ville nouvelle belge depuis la fondation de Charleroien 1666.
Louvain-La-Neuve (LLN) naît ainsi sur base du projet des architectes Raymond Lemaire, Jean-Pierre Blondel et Pierre Laconte. Les principes directeurs de ce projet sont claires : mixité sociale (mélange étudiants/professeurs), échelle humaine et ville piétonne. Le schéma urbanistique de LLN prend appui sur une référence géographique : San Gimignano, village en Toscane dont la partie historique s’articule autour de deux rues parallèles. Une certaineuniformité dans les tons de briques et de pierres, le côté sinueux des ruelles, une harmonie dans les hauteursde bâtisse constituent également une source d’inspiration pour ces architectes.
En parallèle à la construction de la ville, un quartier non planifié se crée en refusant la programmation urbaineimposée par l’UCL. Dans la mouvance de mai 68, le quartier de la Baraque voit le jour et développe un habitat alternatif. Le mode de vie de la Baraque se base alors sur plusieurs principes communautaires : auto-construction,réappropriation du sol, gestion collective et auto-production alimentaire.
Le quartier de la Baraque constitue notre point de départ pour ce quadrimestre.
[Question]
Explorer, Rencontrer, Répertorier, Révéler, Raconter... le quartier de la Baraque constitue le point de départ de toutes les démarches prospectives de l’atelier. Ce quartier peut se définir comme une hétérotopie(Foucault, 1967) : une localisation physique de l’utopie.
« Il y a dans toute culture, dans toute civilisation, des lieux réels, des lieux effectifs, des lieux quisont dessinés dans l'institution même de la société, et qui sont des sortes de contre-emplacements, sortes d'utopies effectivement réalisées dans lesquelles les emplacements réels, tous les autres emplacements réels que l'on peut trouver à l'intérieur de la culture sont à la foisreprésentés, contestés et inversés, des sortes de lieux qui sont hors de tous les lieux, bien quepourtant ils soient effectivement localisables »
La Baraque s’est construit sur une vision différente, en réaction à celle imposée par l’UCL. Les premiers habitants ont du réfléchir à comment habiter un espace affranchi des normes, à comment habiter une hétérotopie. Nous posons la même question aujourd’hui en nommant notre programme :
Au-delà du concept hétérotopique, il faudra aussi comprendre, clarifier et définir la notion d’habiter. Dansl’ouvrage « Demeure terrestre» (Paquot, 2005), l’auteur questionne l’usage de ce terme :
« ‘Habiter’ (wohnen) signifie ‘être-présent-au-monde-et-à-autrui’. […] Loger n’est pas ‘habiter’. L’action d’‘habiter’ possède une dimension existentielle. […] ‘Habiter’ c’est […] construire votre personnalité, déployer votre être dans le monde qui vous environne et auquel vous apportez votre marque et qui devient vôtre. […] C’est parce qu’habiter est le propre des humains […] qu’inhabiter ressemble à un manque, une absence, une contrainte, une souffrance, uneimpossibilité à être pleinement soi, dans la disponibilité que requiert l’ouverture »
Ces étapes analytiques devront permettre à chaque étudiant de proposer un site (autre que la Baraque) enBelgique ou ailleurs dont le choix devra être argumenté.
Ce choix, ainsi que le projet résultant de ce choix, seront la base de la posture attendue par un architecteayant replacé l’Homme au centre de ses réflexions.